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L'œuvre de Pierre Perrault

L'œuvre de Pierre Perrault

Unique dans le paysage artistique et culturel mondial, l’œuvre de Pierre Perrault traverse plus d’un demi-siècle d’histoire et s’incarne sous une multitude de formes d’expression, qui vont de la littérature au cinéma, en passant par le théâtre, la poésie et la radio. À une époque où le Québec est encore fortement imprégné de références culturelles étrangères, Pierre Perrault va littéralement inspirer une prise de conscience et de parole authentiquement québécoise. Fidèle à l’esprit des grands explorateurs, comme Jacques Cartier dont il s’inspire abondamment, il va parcourir le territoire de long en large dans l’intention de nommer le pays avec les mots des gens d’ici. Plus que monumentale, son œuvre demeure d’une profonde pertinence, non seulement parce qu’elle donne généreusement à voir et à entendre, mais surtout parce qu’elle nous invite à réfléchir à ce que nous sommes et à la place que nous occupons dans le monde.

Avocat de formation, Perrault effectue ses débuts sur les ondes de Radio-Canada dans les 1950 alors qu’il écrit et enregistre pas moins de 800 émissions radiophoniques. Fasciné par les possibilités que lui offre le magnétophone et inspiré par la parole des marins, pêcheurs et chasseurs qui vivent sur les rives du fleuve Saint-Laurent, il parvient à s’introduire avec beaucoup d’authenticité dans le vécu des gens et à recueillir lui-même cette parole inédite à laquelle il ajoute ses commentaires poétiques. Déterminante, cette découverte de la parole lui révèle les qualités exceptionnelles d’une littérature de l’oralité encore imprégnée du savoir-faire des habitants qui ont trouvé des mots bien à eux pour parler du pays. De la radio, Perrault passe au cinéma, où il poursuit son approche radiophonique et poétique établissant ainsi les bases d’un cinéma de la parole vécue de l’intérieur.

Emporté par l’aventure du cinéma direct dans laquelle il plonge au début des années 1960 et transporté à la fois par sa quête du pays, Perrault demeure fidèle aux personnages qu’il a découverts à la radio, dont Alexis Tremblay et Grand-Louis Harvey de l’île-aux-Coudres, deux conteurs absolument intarissables, dont les récits fabuleux relèvent de l’épopée. Invitant ses personnages à s’engager dans une action, une quête, un voyage ou une chasse, il parvient à leur faire oublier la présence de la caméra et à stimuler la parole autour de mises en situation qu’il développe habilement film après film. C’est ainsi qu’il réalise, avec la complicité des habitants de l’île-aux-Coudres, une trilogie de films avec laquelle il s’impose rapidement, tant au Québec qu’en France, comme le représentant d’un nouveau style de cinéma où les personnages prennent la parole et se mettent en scène eux-mêmes (Pour la suite du monde, Le règne du jour, Les voitures d’eau). En présentant l’île-aux-Coudres comme une sorte de microcosme d’un pays en pleine mutation, Perrault permet du même coup au cinéma québécois de s’inscrire dans le courant des jeunes cinématographies nationales qui émergent un peu partout dans le monde.

Au moment où le Québec cherche à se définir et à faire entendre sa voix, Perrault explore plus largement la question de l’identité nationale, car il croit important de susciter une prise de conscience et d’exprimer sa passion pour le pays. Aux discours des conteurs fabuleux de l’île-aux-Coudres, il ajoute la parole d’une variété de citoyens de toute origine sociale, ethnique et linguistique pour réaliser un film qui se présente comme un poème symphonique à plusieurs voix (Un pays sans bon sens!). D’une très grande modernité, cette oeuvre poétique et politique demeure un film fondateur, non seulement dans la filmographie de Perrault, mais dans l’ensemble de la cinématographie québécoise et canadienne. Ce film l’amène à poursuivre sa réflexion en donnant la parole à d’autres communautés où la quête d’identité se vit de manière fort différente selon qu’on soit acadien (L’Acadie l’Acadie!?!), abitibien (Un royaume vous attend) ou amérindien (Le goût de la farine).

Comme les personnages, les animaux sont aussi omniprésents dans l’œuvre de Perrault. Du marsouin au bœuf musqué, en passant par la souris, le caribou, le cochon et l’orignal, les animaux sont autant de métaphores qui incarnent la nature du pays et des hommes qui l’habitent. Observant les comportements du règne animal, Perrault tente d’en tirer les conclusions qui s’imposent, comme en témoigne ce film bouleversant où la chasse à l’orignal se transforme en chasse à l’homme (La bête lumineuse). Avec ce film, Perrault réalise une oeuvre d’une criante vérité humaine qui démontre à quel point la réalité cruelle du monde animal s’applique aussi au monde des hommes. Il semble qu’un rapport de force avec les autres occupants du territoire soit inévitable, car il en va de la survie de l’espèce. C’est du moins la conclusion à laquelle il parvient dans son tout dernier film (Cornouailles) où, cherchant à définir notre rapport au territoire, Perrault se confronte à la présence millénaire des bœufs musqués du Grand Nord, une autre métaphore du pays et de la survivance de la race. Devant le silence éternel des bœufs musqués, Perrault n’a pas le choix de prendre la parole lui-même et de revenir au commentaire poétique qui a marqué ses débuts au cinéma. Au terme de sa très longue expédition poétique, radiophonique, cinématographique et littéraire, qui l’a conduit de l’île-aux-Coudres à la Bretagne, de l’Acadie à l’Abitibi, de la Côte-Nord au Grand Nord, Perrault a donné au Québec une des œuvres les plus cohérentes de son temps, où la nécessité de se découvrir n’a d’égal que la volonté de s’appartenir.

« Le problème était de se rendre compte
qu’on valait nous-mêmes la peine d’être vécu. »
Pierre Perrault

Denys Desjardins

Producteur, réalisateur, scénariste, caméraman et enseignant en cinéma, Denys Desjardins a tourné quelques films sur les traces de Perrault, dont Au pays des colons (ONF, 2007). À l’Office national du film, il a récemment coordonné la recherche et l'édition des livrets qui accompagnent chacun des coffrets DVD réunissant l’œuvre de Pierre Perrault.

  • Pour la suite du monde
    1962|1 h 45 min

    C’est le 6 septembre 1535 que l’explorateur français Jacques Cartier, naviguant sur les eaux du fleuve Saint-Laurent, pose son pied sur une île située au bord de la terre du nord, une île avec des arbres de plusieurs sortes, écrit-il, et entre autres il y a plusieurs couldres: Et pour ce la nommasmes l'ysle es Couldres. En nommant les îles et les rivages dans son journal de navigation, en décrivant les paysages et les habitants qu’il rencontre, Cartier prend possession du territoire et s’inscrit dans l’histoire en tant que premier poète du pays. Pierre Perrault demeurera à jamais marqué par ce texte fondateur. Entre 1955 et 1968, Perrault suit assidûment les traces de Cartier, il le cite abondamment et s’en inspire dans pratiquement tous ses projets radiophoniques et cinématographiques. En 1958, après avoir fréquenté et enregistré les habitants de l’Île-aux-Coudres, Perrault collabore à la réalisation du court métrage La traverse d’hiver à l’île aux Coudres qui servira de projet pilote pour une série intitulée Au pays de Neufve-France. C’est dans ce court film qu’apparaît pour la première fois le personnage d’Alexis Tremblay, lequel deviendra la figure emblématique de la Trilogie de l’île-aux-Coudres. Il n’est donc pas étonnant d’entendre dès le début du film Pour la suite du monde les mots du livre de Cartier lus par Alexis Tremblay. Car pour le cinéaste, Alexis Tremblay incarne à la fois la sagesse du livre et la beauté du verbe qui s’est perpétué depuis la venue de Jacques Cartier. Alexis incarne aussi la connaissance ancestrale d’un monde qui est sur le point de basculer sous nos yeux, un monde oublié et perdu sur une île où le temps semble s’être arrêté. Non seulement Pour la suite du monde est le premier long métrage canadien à avoir été présenté au Festival de Cannes, mais il s’agit surtout d’un des rares, sinon le seul chef d’œuvre que le cinéma québécois a donné au patrimoine cinématographique mondial.

  • Le règne du jour
    1967|1 h 58 min

    L’œuvre de Pierre Perrault est marquée par la quête d’identité et aussi par une exceptionnelle continuité, laquelle se vérifie en particulier dans la fidélité que Perrault voue à ses personnages, qu’il reprend d’un film à l’autre. Cette façon de reprendre et de suivre ses personnages est plutôt rare dans le cinéma documentaire, mais elle va rapidement s’imposer comme un style propre à Perrault, particulièrement avec ce deuxième long métrage tourné à l’îÎe-aux-Coudres, où on retrouve les personnages du film précédent (Pour la suite du monde). Non seulement Perrault demeure-t- il fidèle à ses personnages, mais il invente aussi un cinéma où les gens qu’il filme se mettent en scène eux-mêmes à travers une mise en situation qu’il leur propose, ce qui permet de raconter une histoire et non de traiter d’un sujet de documentaire à la manière classique. Cette fois-ci, plutôt que de leur proposer une pêche aux marsouins, Perrault invite ses personnages à faire un voyage, lequel deviendra le prétexte d’un retour aux sources. À la recherche de leurs ancêtres, Alexis, Marie et leur fils Léopold Tremblay partent donc pour la France, dans ce vieux pays qui leur a donné naissance pour mieux les abandonner par la suite. Au-delà des péripéties savoureuses que vivent les personnages plongés dans cette aventure touristique et culturelle, il y a ici tous les éléments qui caractérisent l’œuvre de Pierre Perrault. De la quête d’identité à la prise de conscience politique, Le règne du jour demeure un film étonnant et parfaitement authentique. Sans doute le meilleur film de famille de tous les temps! Fait à remarquer, Perrault invite ses personnages en France et les amène en Bretagne finalement, car la Bretagne est lieu de naissance de l’explorateur et navigateur Jacques Cartier. Pour diverses raisons historiques et politiques, la Bretagne demeure un lieu de prédilection dans l’œuvre de Perrault. D’ailleurs, dans les films qu’il réalisera par la suite, Perrault reprendra le thème du voyage en Bretagne avec Didier Dufour (Un pays sans bon sens!, 1970), Hauris Lalancette (C’était un québécois en Bretagne, Madame !, 1977), Stéphane-Albert Boulais (Les voiles bas et en travers, 1983) et Michel Garneau (La grande allure, 1986).

  • Les voitures d'eau
    1968|1 h 50 min

    Nous sommes en avril 1967, Pierre Perrault tourne une séquence avec Alexis Tremblay qui regarde brûler une vielle goélette en bois sur les rives de l’Île-aux-Coudres. Personnage central de la Trilogie de l’Île-aux-Coudres, Alexis a alors quatre-vingts ans et Pierre Perrault est à la veille d’en avoir quarante. Sans le savoir, c’est le dernier tournage que Perrault effectuera en compagnie d’Alexis, qui nous quittera subitement quelques jours plus tard. Emblématique d’un règne qui est sur le point de prendre fin, cette séquence servira de conclusion au film Les voitures d’eau. Dans le dernier épisode de cette Trilogie, il devient de plus en plus évident que les problèmes économiques et la perte d’autonomie des navigateurs de l’Île-aux-Coudres sont liés au monopole qu’exercent les grandes entreprises sur les moyens de navigation. Devant cette dépossession du Fleuve, qui transforme les marins de l’île en simples spectateurs, Perrault ajoute à la poésie de la parole la nécessité d’une prise de position plus politique que jamais.

  • Un pays sans bon sens!
    1970|1 h 57 min

    What does Quebec want? C’est la question que le Canada anglais se pose en 1967 et à laquelle Pierre Perrault se propose de répondre à l’occasion du Centenaire de la confédération canadienne (1867-1967). Il faut dire que le Québec est en train de vivre des moments historiques que Pierre Perrault a bien l’intention de documenter. C’est d’ailleurs ce qu’il fait alors qu’il filme René Lévesque au moment de la création du Mouvement Souveraineté-Association, en novembre 1967, et l’année suivante, à la fondation du Parti québécois. Rapidement, Perrault se rend compte que Lévesque ne sera pas le personnage principal de ce film, mais qu’il serait plus intéressant de filmer les citoyens que l’homme politique, déjà passablement couvert par les caméras de la télévision. Après presque trois ans de tournage et deux ans de montage, Perrault « accouche » à l’automne 1970 (au beau milieu des événements d’octobre) d’une œuvre magistrale qui, tant par la complexité de son montage que la modernité de son propos, demeure l’un de ses films les plus importants. Un film poétique et politique à l’intérieur duquel Perrault, en plus d’aborder la question de l’identité nationale d’une fort belle façon, parvient à prendre la parole tout en la donnant, réussissant l’exploit, par surcroît, de réunir tous les thèmes et les personnages récurrents qui traversent l’ensemble de son œuvre cinématographique. De Jacques Cartier à René Lévesque, de la Bretagne à l’île-aux-Coudres, de Winnipeg à Moncton, ce film est l’album de famille par excellence qui permet aux Québécois de s’exprimer à travers l’amour d’un pays qu’ils ont bâti. Parmi les personnages principaux nous retrouvons l’incontournable Didier Dufour (également apprécié dans Le goût de la farine), le Manitobain Maurice Chaillot (retrouvé quelques années plus tard dans La bête lumineuse), Marie, Léopold et Laurent Tremblay, les célèbres personnages de Pour la suite du monde (et le mémorable Grand-Louis Harvey) et enfin Yolande Simard Perrault, l’épouse du cinéaste.

  • L'Acadie, l'Acadie?!?
    1971|1 h 57 min

    Alors qu’ils sont en tournage à Winnipeg pour le film Un pays sans bon sens! (1970), par le plus grand des hasards, Michel Brault et Pierre Perrault font la rencontre de deux étudiants acadiens qui les informent de la tenue prochaine d’une manifestation à Moncton, au Nouveau-Brunswick, pour réclamer plus de services pour les francophones. En février 1968, Brault et Perrault s’y rendent donc afin de filmer cette marche de protestation vers l’Hôtel de Ville pour promouvoir le respect du bilinguisme. Puis, contre toute attente, les cinéastes se font refuser l’accès à la séance du conseil municipal où se déroule l’événement. À l’intérieur, le maire Leonard Jones accueille froidement les étudiants et les oblige à s’exprimer en anglais – séquence qui sera filmée par la station de télévision CKCW-TV de Moncton. Un peu plus tard en soirée, les cinéastes filment quelques étudiants qui se rendent à la résidence du maire Jones pour y déposer « une tête de cochon ». Brault et Perrault retourneront à Moncton au cours de l’été pour suivre le quotidien des étudiants acadiens, puis à l’automne 1968 pour filmer la radicalisation du mouvement de protestation, qui sera marqué par l’occupation du pavillon des sciences de l’Université de Moncton. Ce film unique témoigne de la révolte d’un groupe de jeunes francophones luttant farouchement pour la survie de leur culture.

  • Un royaume vous attend
    1975|1 h 49 min

    Alors que le premier ministre du Québec Robert Bourassa annonce, le 30 avril 1971, son fameux « projet du siècle », lequel prévoit l’exploitation de l’immense potentiel hydroélectrique de la Baie-James, Pierre Perrault propose de réaliser une série de films sur l’impact qu’auront ces développements hydroélectriques sur le territoire et sur les populations du Nord du Québec. Ce projet intitulé « Baie James » amènera Perrault à réaliser quatre films en Abitibi avec la complicité de Bernard Gosselin. Un royaume vous attend est le premier de cette série de films , où Perrault amorce le procès de l’histoire de la colonisation de l’Abitibi, laquelle a surtout permis aux compagnies minières et forestières de profiter d’une main d’œuvre à bon marché. C’est en tout cas le discours que tient l’incontournable Hauris Lalancette, colon, agriculteur et politicien, dont l’art de la parole n’a d’égal que l’indignation avec laquelle il défend la cause des habitants de l’arrière-pays. Non seulement Hauris exprime-t-il haut et fort sa colère contre la fermeture des villages et des terres agricoles, mais il milite aussi très activement dans son milieu, ce qui permettra à Perrault et Gosselin de suivre les répercussions de la construction des barrages de la Baie-James sur certains citoyens et agriculteurs de la région. Sans aucune surprise, Hauris s’imposera rapidement comme le personnage central des quatre films que Perrault tournera en Abitibi.

  • Le goût de la farine
    1977|1 h 48 min

    Le goût de la farine est le premier de deux longs métrages que Perrault consacrera aux Montagnais de la Côte-Nord.Toujours préoccupé par les questions liées à la culture et à l’identité, Perrault cherche à comprendre les raisons qui ont conduit les premiers habitants du pays à abandonner leur mode de vie traditionnel au profit d’une vie sédentaire qui ne correspond pas à leurs valeurs ancestrales. Ce film cible davantage la situation actuelle que vivent les résidents de la réserve de Saint-Augustin, là où l’alcool est devenu un symbole de l’aliénation d’une culture millénaire qui a perdu ses repères et son identité. Ce film pose aussi la question de la souveraineté qu’on finit par abandonner pour un peu de farine à laquelle on prend goût, et qui nous contraint de manger le pain des autres. Un portrait fort inquiétant de la réalité des Autochtones qui doivent trouver une façon de répondre à l’invasion d’une culture dominante à laquelle il est parfois très dur de résister. Plus largement, il s’agit d’une réflexion sur l’impérialisme étranger qui impose ses produits et le nouveau mode de vie qui vient avec ; une réflexion politique qui concerne chacun de nous car devant toute les formes de dépendances, nous dit Perrault, la solution serait de se reprendre en main afin de parvenir à rétablir un rapport de force avec celui qui nous envahit. Sur le plan cinématographique, ce film est l’occasion pour Perrault de réunir de ses personnages, en particulier l’Amérindien Basile Bellefleur et Alexis Joveneau, le curé-missionnaire de la réserve de La Romaine, qu’il a fréquentés et filmés dans ses premiers courts métrages à la fin des années 1950; nous retrouvons aussi le biologiste Didier Dufour, personnage central du film Un pays sans bon sens!

  • La bête lumineuse
    1982|2 h 7 min

    La chasse à l'orignal, une tradition au Québec, est ici prétexte à fouiller l'âme québécoise et exalter sa «parole». Dans un «shack» de Maniwaki, des citadins opèrent leur annuel retour à la nature... comme on opère un miracle! Mystères de la chasse, qui courtise chance et habileté, avec ce «buck fever» qui diffracte rêve et réalité! Plaisir de se mesurer aux éléments, et de connaître ses limites! Expérience de la mort pour exorciser sa propre mort et renouer avec la chaîne entière de la vie! Mais aussi, esprit de panache, de bravache et de vantardise, et transposition de moeurs sauvages de la meute au sein du groupe d'amis, où on a tôt fait de repérer une victime, un souffre-douleur qui sera soumis à la torture d'une impitoyable ironie. Une magistrale partie de chasse, une mythologie bien de chez-nous.

  • Cornouailles
    1994|52 min

    Ce film – le dernier de Pierre Perrault – a été tourné sur la terre d’Ellesmere, cette immense île située dans l’océan Arctique, aux confins du territoire québécois, là où contre vent et froidure vivent encore et toujours les bœufs musqués, métaphore suprême de la résistance millénaire d’une race qui ne sait pas mourir. Ultime refuge pour exprimer l’hiver d’un pays qui, comme le bœuf musqué, dure depuis la nuit des temps nordiques, ce film traduit la pensée du cinéaste et poète Pierre Perrault. C’est en 1972 qu’il amorce l’écriture d’un long poème épique intitulé Gélivures, un chant en trois temps Neigeries, Froidureté et Cornouailles, où le poète exprime le sens du pays qui est en lui, un pays marqué par les traces du temps sur le paysage. Paru aux Éditions de l’Hexagone en 1977, ce poème a finalement donné naissance à ce film unique dans l’œuvre de Pierre Perrault, un film sans être humain et sans paroles, sinon celle d’un cinéaste qui a consacré sa vie à filmer la parole des autres. Loin, très loin, des documentaires animaliers, ce film est plutôt le fruit d’une imposante réflexion sur le pays et sur l’occupation du territoire, le point culminant d’une œuvre cinématographique et littéraire entièrement dédiée à mettre au monde un pays qui l’a vu naître.